Cameroun: Paul Biya malade… et alors ?…

Tout bien pensé, était-il, en fin de compte, si indispensable d’accorder aux élucubrations du quotidien français, « Le Monde », le battage médiatique dont elles ont bénéficié, parce qu’elles ont fait irruption dans la vie privée du président de la République, M. Paul Biya, en parlant, entre autres, de son état de santé ?

Même lorsqu’il s’agit d’un article publié dans l’un de ces quotidiens du Nord auxquels on accorde, bien naïvement, une perfection professionnelle avérée, aucune raison ne devrait pousser à donner de l’importance aux « révélations » qui n’en sont point. Des « chiens écrasés » ne méritent aucune attention particulière.
Si quelqu’un nous avait dit que le président Biya est malade, avec un petit air d’en rire, nous lui aurions tout de suite rabattu le caquet, en lui rétorquant : « Et alors ?… Après tout, n’est-il pas un être humain ?… » En revanche, si l’on nous avait dit que le chef d’Etat n’est jamais tombé malade, nous aurions répondu, sérieusement fâché :
« Vous mentez ! ». Car, nous ne croyons pas aux natures humaines qui ne seraient pas humaines.
C’est courant : des dirigeants africains tolèrent souvent que leurs courtisans les affublent de surnoms grandioses.

Ici, c’est le « Père de la Nation » ; là-bas, c’est le « commandant suprême » ;
plus loin, c’est le « Descendant du Roi Salomon » Le continent noir a même eu l’honneur d’accueillir, en plein 2Oème siècle, l’avènement d’une dynastie (vite éteinte) d’ « Empereurs ». Pourtant, cela fait trente-trois ans, comme les « amis du Cameroun » aiment tant le rappeler, que Paul Biya est au pouvoir.
Nous n’avons, de la bouche d’aucun griot, d’aucun flagorneur, entendu des louanges faisant du chef de l’Etat du Cameroun un homme extraterrestre que la maladie n’a jamais égratigné et que toute souffrance physique a toujours épargné. Dans l’équipe des membres du gouvernement, on trouve des ministres bavards, dont le dithyrambe enflammé a quelquefois prêté au président Biya des vertus et des qualités presque surnaturelles.
Mais, même ces minitres inspirés n’ont jamais laissé croire que le président camerounais avait reçu des dieux le privilège inoui d’être immortel, comme eux. Dans les rangs du RDPC, aucun camarade n’a osé poser, sur le front du président national, le diadème de l’immortalité. Bien au contraire, nous avons pu observer, à travers son frère cadet, son épouse, sa mère et sa belle-mère, combien la maladie et la mort se plaisaient à roder autour du président Biya, rapportant ainsi la preuve que Paul Biya avait, face à ces étapes tragiques et à ces destinations incontournables, la même dimension humaine que tous ses autres compatriotes. Biya n’a jamais caché son âge. Il a quatre-vingt deux ans. Un bel et grand âge que des présidents français (Coty, De Gaulle, Pompidou, Mitterrand) ayant, depuis leur tendre enfance, bénéficié d’un environnement sanitaire plus soigné, n’ont, ni dépassé, même atteint… Dès lors, quelle minable et lamentable lapalissade on commet, quand on se targue de « révéler » qu’un homme de quatre vingt-deux ans peut, lui aussi, tomber malade, alors que des milliards d’êtres humains, à travers le monde, nés en 1933, sont, aujourd’hui et depuis longtemps, déjà morts de maladie et enterrés !
Curieux tout de même que « Le Monde » qui s’intéresse tant à Paul Biya ne rappelle nulle part que François Mitterrand, déjà bien malade, dirigeait la France, que, perclus de rhumatisme, Roosevelt a vaincu Hitler ou que Bouteflika, de son fauteuil roulant, dirige d’une main de fer, la grande Algérie. Il faut croire que cela doit déranger bien des gens, surtout dans la rédaction du Quotidien « Le Monde », de voir, lors de la cérémonie des vœux à la présidence de la République, Biya, malgré son âge vénérable, debout et droit comme un stick, serrer des milliers de mains, sans chercher à s’asseoir. Ils doivent enrager tout autant, quand leur « grand malade » assiste, de longues heures durant, à l’imposant défilé du 20 Mai, sans broncher, ni somnoler.

Patrice Etoundi Mballa / Le jour

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