CHEIKH ANTA DIOP: La Thèse de Doctorat refusée

C’était en 1951, à 28 ans, Cheikh Anta DIOP prépare une thèse de doctorat à l’Université de Paris, son titre: De l’Antiquité Nègre Égyptienne aux Problèmes culturels de l’Afrique Noire d’Aujourd’hui, dans laquelle il affirme que la Civilisation Égyptienne était noire, qu’elle était antérieure à toutes les autres et que la langue et la culture égyptiennes se sont ensuite diffusées dans l’Afrique .

La thèse est refusée, officiellement parce qu’il ne parvient pas à réunir un jury. Mais, la vraie raison était ailleurs: le monde académique à l’époque, n’était pas disposé à accepter la vérité qui sort de la tête d’un « colonisé ». Laquelle vérité remettait en cause toute la littérature produite jusqu’à sur l’origine des égyptiens antiques.

Aimé Césaire, se bat alors pour lui trouver un éditeur, la thèse refusée sort enfin en 1954 sous forme de livre, chez présence africaine de Alioune DIOP, sous un titre devenu mythique de NATIONS NÉGRES ET CULTURE.

« Le livre le plus audacieux qu’un nègre ait jamais écrit », en dira Aimé Césaire dans son Discours sur le colonialisme.

Le livre rencontre un succès historique, le jeune intellectuel africain est invité dans les débats et commence à animer des conférences, Cheikh Anta à 30 ans.

Contre mauvaise fortune, l’Université accepte enfin qu’il soutienne sa thèse, Il obtiendra finalement son doctorat en 1960 avec la mention honorable. Il ont évité, de façon subtile, la mention Très Bien pour tenir Cheikh Anta DIOP éloigné des amphithéâtres. Il ne fallait pas qu’il devienne professeur, il ne fallait pas qu’il ait un contact avec les étudiants des universités africaines…

Ce cordon sanitaire est toujours là, CHEIKH Anta DIOP doit être oublié, ses travaux discrédités, pour que la pensée coloniale continue à dominer le monde des idées en Afrique et a asservir les consciences ». Menaibuc Imhotep

Réaction du Pr. Grégoire Biyogo, Fondateur et Directeur de l’Institut Cheikh Anta Diop (ICAD). Président du Comité des savants et Experts africains.

Le rappel détaillé du refus suspect de cette première thèse diopienne de 1951 par la prodigieuse institution de La Sorbonne en vaut bien la chandelle, pour bien comprendre à la fois l’ancienneté et l’ampleur du Combat qui était celui du savant africain – et qui est encore le nôtre aujourd’hui – dans le cadre de la restitution de la vérité historique sur la contribution technique, scientifique, politique, culturelle et spirituelle de l’Afrique en particulier, et sur les penseurs et les grandes figures Noirs en général. Vous faites bien aussi d’évoquer la vigilance critique et toute prophétique du jeune Césaire, qui prend de bonne heure la mesure de cette première production du Neb en 1954, qui restera toujours sur le plan formel, méthodique et du contenu un ouvrage « révolutionnaire ». Il en est de même de sa carrière universitaire d’enseignant qui commence très tard, tandis qu’il rentre au Sénégal en 1959 après ses études en France, il faut attendre 1981, soit 22 ans, le départ de Senghor de la Magistrature suprême pour que son successeur, Abdou Diouf, nomme enfin Diop professeur à l’Université qui devait peu après sa mort porter son prestigieux nom. Toujours est-il que, dans le pays même dont l’Université porte l’emblème du célèbre physicien égyptologue, son oeuvre reste mal connue, comme au demeurant dans les pays de l’Afrique et de la diaspora où elle ne figure pas véritablement dans les programmes officielle en vue de la transmission des connaissances, même si récemment seulement, le président sénégalais Sall en a fait une Recommandation formelle. Pour terminer, il convient de préciser que le Combat du grand égyptologue et homme politique africain pour la souveraineté scientifique, technologique et intellectuelle du Continent africain n’est pas derrière nous, mais bien devant nous, et que les pourfendeurs africains de cette oeuvre se plombent eux-mêmes les pieds, car il s’agit de la meilleure illustration de la probité intellectuelle et de la défense du rationalisme, de la dignité humaine sans coordonnée ethnique et de la liberté de l’esprit. Combat pour lequel nous avons consacré notre oeuvre et notre vie.

Je rappelle enfin que le refus de cette thèse n’a pas été motivé par la dénégation de sa non scientificité, mais simplement la résistance opposée à la scientificité elle-même…

Et que Diop reste un chercheur et un universitaire précoce contrairement à une certaine mythographie propre à ses détracteurs… C’est déjà en 1945 qu’il obtient coup sur coup ses deux baccalauréats…. Il écrit son premier alphabet et une histoire du Sénégal au Lycée, et sa première thèse à 28 ans…

Par Grégoire Biyogo

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